Congrès Nafems Essais et Modelisation puis on ajoute les fixations nécessaires, nous évitant ainsi d’effectuer des communications majeures. Quels ont été les résultats de ces opérations de simulation lors du premier essai ? Le premier vol a été réalisé le 14 juin 2013, le deuxième au second semestre. Les essais ont été concluants, montrant que la structure était très saine, tout en sachant que l’A350 est le premier avion véritablement hybride ; sa structure étant composée à plus de 50% de matériaux composites. Quels ont été les principaux défis de ce projet ? Nous avons incité nos partenaires à redoubler d’efforts, à commencer nos fournisseurs de code qui ont dû repousser certaines limites. Il faut dire que lorsque l’on travaille sur un seul tronçon, on atteint déjà 70 millions de degrés de liberté. Aujourd’hui, on a dû multiplier par dix ce nombre. Nous avons travaillé avec Dassault Systèmes et sa suite logicielle Abaqus. Il s’agit d’un partenariat à la fois intense et pleinement réussi. Toutefois, dans le domaine de la simulation, il reste beaucoup à faire dans la mesure où cette partie représente encore plus de 50% du volume horaire du projet ! Les efforts sont à fournir en matière de CAO et de simplification, mais aussi au niveau du maillage et de la mise en place des interfaces. Il en est de même pour le post-traitement : on étudie une dizaine de cas de charges comme la flexion de la voilure, et dans lesquels on étudie plusieurs dizaines de critères avec des millions de degrés de liberté. Tout est automatisé mais en termes de carte graphique et de l’aspect hardware, on atteint très vite la limite, de même que le codage logiciel. Mais nous avons réussi, d’autant que nous sommes parvenus à travailler avec l’ensemble des sites d’Airbus, que ce soit à Toulouse, à Hambourg, au Royaume-Uni ou en Espagne ; l’ensemble des tronçons était concerné. Pensez-vous reprendre ce modèle pour les prochains développements d’Airbus ? Oui, nous allons travailler davantage sur des approches similaires. Nous pensons en effet qu’à l’avenir, c’est comme cela qu’il faut travailler, en particulier pour les questions de robustesse de façon à être le plus proche possible de la réalité mécanique pour des raisons de sécurité avant tout. Cela permet également d’éviter de lancer des dizaines de modèles de tronçons. Enfin, outre le facteur inhérent d’économies, obtenir un modèle d’ensemble permet à tous les départements d’en faire référent sur lequel il possible de travailler à l’échelle du groupe. Mais ce modèle d’ensemble n’est véritablement possible que dès lors qu’on aura pu suffisamment réduire les temps de mises en place des modèles numériques. Aujourd’hui, nous avons prototypé un système ; demain, il faudra l’industrialiser. Propos recueillis par Olivier Guillon Métiers La simulation numérique se professionnalise Si l’aéronautique, l’énergie ou encore le ferroviaire ont considérablement progressé dans le domaine de la simulation numérique, l’automobile maintient toujours son avance sur les autres secteurs d’activité. Mais au sein de ce même secteur, certains constructeurs, à commencer par le groupe PSA Peugeot Citroën, sont allés plus loin en ayant professionnalisé certaines activités comme la création de méthodologies et la formation à la conception et à l’utilisation d’outils de plus en plus performants. Chez PSA, le métier d’ingénieur en méthodologies numériques dans l'aérodynamique des moteurs est une activité à part entière. Ce métier existe même depuis près de vingt ans au sein du groupe. Arrivé en 2002 chez PSA Peugeot Citroën, d’abord en tant que prestataire extérieur durant trois ans avant d’être pleinement intégré chez le constructeur français, Olivier Davodet, maintenant expert numérique à la direction chaine de traction et châssis, a occupé ce poste en ayant pleinement conscience d’être l’un des rares en France à exercer une profession encore peu connue, y compris dans le secteur automobile. En quoi consiste-telle ? Tout simplement à créer des méthodologies numériques, à former les métiers de la conception à l’utilisation des logiciels de calcul. « Notre rôle est d’aider les bureaux d’études à trouver le logiciel le plus adapté aux défis de développement et de production, à bien s’en servir, de le paramétrer correctement afin de réaliser une simulation numérique, exercer le bon maillage, la mise en données et réaliser du post-traitement de ces données », résume Olivier Davodet. En somme, le service crée et forme aux méthodologies, puis supporte au quotidien le personnel dans l’utilisation des logiciels. Vu bien souvent comme un centre de coûts, le département des méthodologies numériques présente pourtant des intérêts évidents, et le construc- Essais & Simulations • JUIN 2014 • PAGE 30
Congrès Nafems Essais et Modelisation Congrès Nafems - une intervention sur les engrenages Le groupe PSA Peugeot Citroën présentera un projet pour les engrenages de boîtes de vitesses qui subissent des procédés en usine pour les rendre plus durs. Ces pièces sont par exemple mises dans des bains d’azote et de carbone pour accroître leur dureté puis trempées dans l’huile pour les refroidir. Or cela les déforme. Ainsi, pour maintenir les mêmes propriétés géométriques, on modélise l’ensemble des procédés en numérique, ainsi que l’enchainement multiphysique des calculs, par la mécanique des solides et des fluides pour la trempe d’huile. Après un mois de phases de calculs, on sait comment les pièces sont déformées, et ce selon des critères bien définis par un cahier des charges rédigé par le donneur d'ordres. mérique », formant ainsi une véritable lame de fond dans le paysage industriel. « Le souffle du numérique croît continuellement et a rendu possible un nombre bien plus élevé du nombre d’opérations de simulation ». De même, avec l’évolution des moyens de calcul, « nous sommes passé d’un stade où l’on ‘’faisait au mieux avec ce que l’on avait’’ à une époque où l’on simule désormais tout ce que l’on veut. On va donc beaucoup plus loin dans l’analyse tout en ajoutant des aspects multiphysiques. Nous sommes également capables d’explorer plus de possibilités et plus rapidement ». Dans l’automobile, Olivier Davodet ne ressent pas d’essoufflement particulier quant aux progrès et à l’utilisation de la simulation numérique. Bien au contraire. Outre des évolutions franches dans les outils et les moyens logiciels disponibles sur le marché, l’ingénieur constate que la simulation est aussi utilisée de façon bien plus pragmatique. Mais cela semble être davantage lié aux impératifs du secteur automobile et ses délais courts, contraignant les acteurs de la simulation à faire des tentatives fiables pour répondre très rapidement aux exigences émises par les autres services. Ces progrès sont pour l’essentiel liés à la puissance des moyens de calcul. D’ailleurs, le constructeur français possède deux centres de calculs, l’un en région parisienne, l’autre dans l’est de la France. L’objectif étant de toujours maintenir cette avance de façon à réduire le coût des calculs et être à la fois plus précis et compétitifs. teur français ne s’y est pas trompé. Tout d’abord, le fait de disposer de ressources compétentes dans le domaine du numérique et très spécialisées procure un avantage concurrentiel. De plus, cela permet de combler le décalage entre le projet et le produit fini ; « le service permet de ‘’bencher’’ les logiciels et de prendre un peu de hauteur sur les solutions existantes de manière à mieux les choisir et les adapter aux besoins ». Enfin, ce service est transversal et, dans un contexte où les opérations sur des aspects multiphysiques prennent de plus en plus d’ampleur, il permet d’entretenir des liens très proches entre les métiers, comme par exemple entre la mécanique et l’aérodynamique. Toutefois, il faut prendre gare à ne pas trop s’éloigner de la conception et à maintenir des connaissances pointues à propos du produit final ; « nous travaillons beaucoup sur cet aspect en interrogeant tous les métiers de façon à ne pas éloigner la modélisation des attentes des bureaux de conceptions ». Un métier toujours en constante évolution Le métier s’est beaucoup professionnalisé. Désormais, le « numérique » n’est plus une option mais bel et bien un levier inévitable de compétitivité. Progressivement, on a assisté au remplacement du « physique » par le « nu- Des défis à relever pour « démocratiser » la simulation numérique Une puissance de calcul infinie… c’est en quelque sorte le rêve d’un ingénieur méthodologie numérique. « La puissance de calcul demeure en effet le nerf de la guerre. L’augmentation de cette puissance, c’est l’un des défis de la simulation aujourd’hui. Par ailleurs, on perd encore trop de temps sur les outils de CAO dans le pré-traitement des données ». A l’avenir, Olivier Davodet nourrit l’espoir d’une simulation numérique « démocratisée ». Aujourd’hui, le métier d’ingénieur calculs est encore trop peu vulgarisé dans l’entreprise. Pourtant, son rôle est dynamique et continue d’évoluer. Il promet d’occuper une place de plus en plus importante. « Je vois de la simulation partout ! C'est pourquoi nous devons la rendre accessible à tous, jusqu’au technicien. Pour cela, la simulation ne doit pas rester trop complexe ». Olivier Guillon Essais & Simulations • JUIN 2014 • PAGE 31
Loading...
Loading...
Loading...
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux
LinkedIn
Twitter
Facebook