Essais et Modelisation « Avec ce système, on repousse les limites du possible… ». Mais l’impression 3D reste aujourd’hui un procédé long et peu – ou pas – adapté aux productions de masse ; une machine ne peut pas produire des dizaines de pièces par jour. Dans ce cas, de grandes séries les procédés par moulage ou usinage restent infiniment plus rentables. Ainsi, l’impression 3D ouvre certes la possibilité nouvelle de réalisations de pièces jusqu’alors impossibles à réaliser par les techniques « traditionnelles » mais reste réservée à la production de prototypes, pièces uniques ou en très petites séries. Pour la production, l’impression 3D n’est économiquement viable que dans le cas ou les quantités produites ne remboursent pas les investissements d’outillages spécifiques comme des moules d’injection et le temps de réglage et mise en route des machines. Toutefois, pour le bureau d’études et le prototypage, l’impression 3D permet un gain de temps important et offre au concepteur la possibilité nouvelle de tester presque immédiatement une pièce. « Ce que nous pouvons espérer pour l’avenir, ce serait des machines moins chères et beaucoup plus rapides », résume Étienne Bernot, dont l’entreprise qu’il dirige a investi plus de 100 000 euros dans une imprimante 3D à dépôt de résine pour la fabrication de pièces spéciales pour des maquettes pédagogiques produites en petites séries comprises entre 100 et 200 pièces par an. Pour que la révolution industrielle annoncée autour de l’impression 3D devienne vraiment une réalité, il reste encore aux industriels à rendre leurs machines plus performantes et plus accessibles et élargir leur clientèle jusqu’aux PME et particuliers. Les nouvelles « petites » imprimantes 3D à dépôt de fil (compactes et peu chères) ouvrent la voie d’un nouveau marché. Mais curieusement, à l’exception de quelques grands fabricants de machines cités plus haut, les professionnels historiques du secteur ne semblent aujourd’hui pas concernés par le phénomène. Ils considèrent souvent sans avoir vu de près ces nouvelles machines de table avant de les considérer comme des gadgets. D’ailleurs, dans les médias « grand public », on n’entend parler que de jeunes spécialistes lancés depuis un ou deux ans dans l’aventure, et qui ne connaissent que les fab lab et les imprimantes « de table ». Il reste donc aux industriels d’orienter leurs efforts vers des machines plus performantes et plus accessibles pour, enfin, marquer d’une pierre blanche l’arrivée d’une nouvelle révolution industrielle… Olivier Guillon En application Quand l’armée de l’air fait appel à la fabrication additive Le grand centre de formation texan de l’armée de l’air américaine a recours à de nombreux outils pour assurer l’enseignement des pilotes et des soldats. Afin de gagner du temps et réduire les coûts affectés au développement de ces précieux outils de formation, le Trainer Development Flight (TDF) a fait appel à Stratasys, leader mondial de la fabrication additive et de l’impression 3D. Installé sur la Sheppard Air Force Base, Wichita Falls, au Texas, le TDF est une installation où sont conçus, développés et fabriqués des outils pour les formateurs et la formation pour l'armée de l'air et toutes les branches de la défense, selon les besoins. Ces outils sont utilisés dans de nombreux environnements de formation, notamment les avions, les armes et les systèmes d'alimentation en combustible, la préparation médicale, les HVAC et les systèmes de télécommunications. Les outils pour les formateurs et la formation peuvent être soit des produits originaux ou des répliques de ces derniers, en fonction de l'objectif de la formation. Certains dispositifs ne sont pas des unités fonctionnelles, il n'est donc pas rentable d'acheter le vrai élément. Pour la plupart des applications de formation, cela revient moins cher de former les étudiants sur des répliques, plutôt que sur un équipement souvent très onéreux. Le TDF utilise la fabrication numérique directe pour fabriquer la grande majorité de ses produits de formation. Pour cela, ils emploient quatre machines de fabrication additive dans une installation centralisée avec des processus AFSO 21 (Lean) incorporés au processus global. Essais & Simulations • JUIN 2014 • PAGE 24
Essais et Modelisation Le défi Avant d'intégrer à ses processus la fabrication numérique directe, le TDF réalisait ses produits à l'aide de méthodes de fabrication traditionnelles. La fabrication conventionnelle demande des délais plus longs, car elle se déroule souvent en plusieurs étapes, notamment l'usinage, le tournage, la soudure, le pliage et le découpage des plaques en tôle. Le même type de difficulté survient lors de la production d'outillage pour mouler une pièce. « La majorité de nos projets sont soit uniques soit en très faible volume, les méthodes conventionnelles reviennent donc très cher, indique Mitchell Weatherly, directeur de TDF. Seuls 10 % de notre travail concerne le prototypage, les 90 % restants sont de la production. » Une solution Avant d'adopter le procédé de dépôt de fil tendu (fused deposition modeling : FDM), le TDF a examiné « une multitude » de processus additifs, explique le directeur du centre. « Avec la FDM, l'investissement se fait au début, il n'est pas permanent, affirme-t-il. Les pièces sont durables et offrent le degré de détail élevé dont nous avons besoin. De plus, le processus est respectueux de l'environnement et 100 % ‘écologique’ sans aucun déchet. » Le TDF est chargé de la conception et de la fabrication d'une réplique exacte d'un véhicule aérien sans pilote (UAV) ou “drone” pour la formation des techniciens de maintenance. De nombreux éléments internes et externes ont été construits à l'aide des machines FDM. Ils incluent de nombreuses pièces du corps de l'appareil, ainsi que plusieurs capots, hélices et antennes. Le TDF a également acheté un certain nombre de vrais éléments de l'UAV auprès de l'équipementier. Des avantages significatifs La production d'une grande antenne pour l'UAV, à l'aide des machines FDM, a pris un dixième du temps qu'aurait demandé le même travail par des méthodes traditionnelles. De plus, le retour sur investissement obtenu s'est élevé à plus de 12 000 dollars. Mais, les économies ne sont uniquement liées au temps. Pour réaliser cette antenne, un atelier externe aurait nécessité vingt jours contre seulement deux avec la FDM — pour quinze à vingt minutes de travail. Si l'on considère la totalité du projet d'UAV, le temps économisé atteint trois ans dans certains domaines. Ce projet, ainsi que d'autres économies en matière de formation, a été réellement impressionnant, avec des économies réalisées de 800 000 dollars sur les quatre dernières années. « Les principaux avantages du système FDM sont sa vitesse par rapport à d'autres processus ou méthodes de construction, sa polyvalence par rapport au moulage par injection, et sa capacité à fabriquer plusieurs pièces simultanément », déclare Mitchell Weatherly. Il offre également une maintenance simple, ainsi que la possibilité d'utiliser plusieurs matériaux pour tout un tas de buts différents. « Les capacités supplémentaires incluent la possibilité de penser selon l'objectif à atteindre et pas selon des contraintes de fabrication, ainsi que la possibilité d'appliquer immédiatement les modifications, pour un faible coût additionnel. La polyvalence qui nous permet de fabriquer n'importe quel élément, sans produire aucun déchet dangereux, constitue l'un des avantages majeurs pour l'armée de l'air, affirme le directeur du TDF. Les machines FDM ont été utilisées pour de nombreux projets de formation au budget très serré. Nous avons également utilisé le processus FDM pour la recherche et le développement, afin de permettre à nos aviateurs et à nos soldats de s'entraîner en situation réelle. » « Lors de l'achat de notre première machine FDM, nous avions prévu un ROI sur quatre ans, mais dix-huit mois ont suffi, explique Mitchell Weatherly. Pour l'achat de notre seconde machine FDM, le ROI a été réalisé en neuf mois. On ne peut pas éviter d'appliquer des méthodes conventionnelles et d'employer des techniciens très compétents, mais on peut leur fournir les outils appropriés et une nouvelle technologie qui peut rendre leur travail plus facile et plus compétitif. Je pense que la FDM est l'une des méthodes de fabrication disponible les plus avancées au niveau technologique. Depuis 2004, l'année où nous avons acheté la première de nos quatre machines, le processus FDM a permis au gouvernement d'économiser 3,8 M$, et les prévisions sont d'une économie de 15 M$ sur dix à quinze ans. » Essais & Simulations • JUIN 2014 • PAGE 25
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